mardi 5 mars 2019

La Forêt des araignées tristes, de Colin Heine


La Forêt des araignées tristes de Colin Heine est la deuxième lecture de mon partenariat avec ActuSF. Je ne lis presque jamais de steampunck, et ce roman a été l'occasion de me replonger dans ce genre inspiré de Jules Verne.

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Gale, XIXe siècle. Bastien est paléontologue. Passant son temps dans son atelier entouré d'os et de livres, il se promène un jour à l'Omniexposition, et découvre une invention qui l'intrigue : un dirigeable piloté à distance. L'inventeur propose au public de monter à bord afin de tester l'engin. Bastien s'y décide, mais ne pourra pas vraiment profiter du vol : la navette se fait percuter par une gargouille et son cavalier et sombre dans le lac, entraînant les passagers. Le jeune homme en réchappe miraculeusement, sans se douter qu'il vient de mettre le pied dans une toile bien trop grande pour lui. Aidé de ses amis Ernest le baroudeur, Agathe sa servante, et Angela une jeune Germanienne traquée par son propre pays, il devra déjouer les plans d'une histoire d'espionnage d'envergure internationale, tout en étant chassé par un assassin et poursuivi par une étrange créature issue de la vape...

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Le décor est une Belle Époque plongée dans la vape, un étrange brouillard qui est une source d'énergie pour les machineries comme les dirigeables, et de pollution. De cette vape toxique naissent plein de créatures tapies dans les tréfonds des eaux et des forêts. C'est sur cette brume que cette société du XIXe s'est bâtie. Les gens de la haute habitent sur des piliers, en hauteur, et se déplacent dans les airs, notamment grâce aux gargouilles, et le petit peuple, lui, traînent ses savates en bas, dans la brume fétide. La hiérarchie sociale n'est donc pas que figurée, elle est aussi littérale (pour ne pas dire verticale). La Gallande est en compétition avec les pays avoisinants, tels que la Germanie, l'Anglésie, la Lupanie et l'Hispanie. Tous ces pays ne sont pas sans rappeler des pays actuels... Cette compétition, ou guerre économique, se base sur la recherche incessante de ressources énergétiques comme l'ignium, qui permet l'invention de nouvelles technologies. L'auteur a planté un univers riche et fascinant, qui fait la part belle aux piques écologiques et reproche l'avidité mortifère des hommes pour l'argent.
On prend plaisir à suivre différents personnages tout au long du roman : Gerfon, Ernest, Agathe, Angela, Bastien, tous ont voix au chapitre : le point de vue interne les rend vivants et attachants, et parsème la lecture de tranches de vie intrigantes. Personnellement, j'ai beaucoup apprécié Ernest, qui est un aventurier courageux et marginal.

Toutefois, il y a des points négatifs. J'ai trouvé l'enquête mal menée : des hypothèses venues d'on ne sait où énoncées par Agathe (qui est bien renseignée et véhémente pour une domestique) sur l'accident de navette auquel Bastien a réchappé, et sur la bombe déposée dans le bureau de Dumanche, le patron de la société qui gère les gargouilleries : Bastien a vu l'assassin, et de ce fait, Agathe en tire la conclusion qu'il va vouloir le tuer. De même pour la fin : tout le monde se retrouve sur le Gigantique, le plus grand dirigeable au monde, y compris l'assassin et l'inventeur tant recherché tout au long du livre. Pourquoi ce dernier se trouve à bord ? Aucune idée.
De plus, on a l'impression que les chapitres sont collés les uns aux autres par un assemblage douteux, ils ne se répondent pas tous, et certains sont même inutiles (je pense à l'aventure d'Ernest qui est plutôt dispensable même si agréable à lire). Plein d'éléments se retrouvent également sans réponse : pourquoi Bastien a-t-il vu l'assassin alors que ce dernier portait sa fleur d'invisibilité ? Pourquoi est-il poursuivi par une araignée géante (la même que celle à laquelle Ernest a eu affaire lors de son expédition) ? Et la fin : quel est le point, comme diraient nos amis Anglais ?
J'ajouterais de la maladresse dans la narration : un mélange des temps verbaux confondant : un coup on a du présent, un autre du passé simple. Il faut choisir.
Enfin, quel est le rapport entre le titre et le livre ?

En conclusion, La Forêt des araignées tristes a un univers très intéressant, qu'on aurait aimé voir davantage développé, avec de belles trouvailles (je pense notamment aux gargouilles comme moyen de transport, ça m'a beaucoup plu) mais une trame trop emmêlée et décousue pour que ce roman reste en mémoire. Dommage.


Ce roman a été lu dans le cadre du 7e challenge de littérature de l'imaginaire.



La Forêt des araignées tristes, éd. ActuSF, coll. "Les Trois Souhaits", 2019.

1 commentaire:

  1. Un avis honnête qui me rend tout de même curieuse ! Je me familiarise peu à peu avec le steampunk, c'est un genre que j'apprends à découvrir. Je ne sais pas si je me pencherai sur ce livre mais je te remercie pour la découverte !

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